Tanya Merceron est la nouvelle coordinatrice régionale du BIOPAMA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, basée à Ouagadougou, au Burkina Faso, auprès de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Dans cette interview, elle nous raconte son parcours professionnel avant de rejoindre l’UICN, la stratégie de mise en œuvre et les principales activités de BIOPAMA dans la région pour l’année 2019.
Tanya a pris ses fonctions chez BIOPAMA à la mi-septembre, parallèlement au lancement de la deuxième phase du programme dans cette région. Tanya est une ressortissante haïtienne ayant une formation en droit, spécialisée en éthique des droits de l’homme. Elle est également titulaire d’une maîtrise en développement de l’Université Senghor, axée sur la gestion de l’environnement.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel avant de rejoindre l’UICN?
Je viens d’une ville du sud d’Haïti appelée Les Cayes. En tant que bénévole, j’ai débuté mes activités professionnelles en apportant un soutien au Programme d’entraîneurs pour jeunes femmes et enfants (PEJEFE), une organisation haïtienne à but non lucratif travaillant dans les quartiers défavorisés de Port-au-Prince et des zones rurales d’Haïti. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à comprendre les liens entre les communautés et leur environnement, et à partir de là mon fort engagement envers la paysannerie et le projet de société qu’elle porte.
J’ai ensuite poursuivi par des postes et des consultations avec des organisations nationales telles qu’Enfofanm, la PAPDA, le Mouvement des agriculteurs de Papay, mais également avec des ONG internationales telles qu’Oxfam et Action Aid, qui ont contribué à affiner cette orientation.
La connexion avec les communautés m’a permis de découvrir des dynamiques très intéressantes analysant les liens entre l’état actuel des ressources naturelles, les pressions anthropiques auxquelles elles sont soumises et leurs conséquences sur le mode de vie des populations.
Tout cela m’a donné les outils nécessaires pour concevoir des stratégies tenant compte à la fois des défis environnementaux et des politiques publiques afin de garantir une gouvernance environnementale participative lorsque je suis devenu membre du système des Nations Unies. J’ai d’abord travaillé au PNUD pour mettre en œuvre un projet de renforcement des capacités pour le ministère de l’Environnement d’Haïti, à travers lequel je devais mettre en place un système de gestion décentralisée des ressources naturelles avec les autorités locales. J’ai également facilité la prise en compte des évaluations environnementales dans la conception des politiques.
Ensuite, j’ai rejoint l’équipe des Nations Unies pour l’environnement dans la gestion du projet “Approche écosystémique de la côte sud d’Haïti”, qui comporte un volet important sur les aires marines protégées. Cette initiative m’a permis de contribuer au développement participatif des plans de gestion de ces AMP tout en formant la population locale et en introduisant des activités génératrices de revenus afin de réduire la pression exercée sur les ressources en poisson.
Enfin, j’ai également enseigné à la Faculté d’agronomie de l’Université Notre Dame d’Haïti. J’étais responsable du cours d’initiation à la gestion de l’environnement et l’un de mes objectifs était de permettre aux étudiants de concevoir un système combinant agriculture, respect de l’environnement et respect des droits de l’homme. Nous avons mis en place des projets très intéressants sur le campus universitaire, notamment un jardin périurbain. C’était vraiment une belle expérience.
Quelle est votre vision de l’avenir du BIOPAMA?
BIOPAMA est un programme mondial qui vise à améliorer la conservation à long terme et l’utilisation durable des ressources naturelles dans les zones protégées et les communautés environnantes. Le programme soutient le développement et l’application d’outils de gestion des données et d’informations, ainsi que de services pour l’amélioration des connaissances et des capacités, toujours par l’intermédiaire des observatoires régionaux, afin d’améliorer la planification et la prise de décisions concernant les aires protégées aux niveaux national et local.
Nous en sommes au début de sa deuxième phase. Il est donc essentiel de capitaliser sur les acquis et les leçons apprises au cours des cinq dernières années tout en introduisant un esprit novateur, en vue de trouver des solutions aux défis déjà identifiés et de garantir la réalisation des activités grâce à de nouvelles technologies. partenariats pour atteindre des résultats à long terme.
En fait, début décembre, nous avons lancé l’initiative BIOPAMA Experiences Capitalisation, qui vise à identifier, analyser et documenter les expériences de la première phase du programme BIOPAMA afin d’orienter la seconde phase des interventions sur la base des résultats, des enseignements tirés et des bonnes pratiques identifiées.
Nous espérons que cette initiative aboutira, entre autres, à l’élaboration d’une série de brèves publications et d’autres produits de communication décrivant les expériences du programme, sur la base d’une analyse des expériences, des points de vue individuels et institutionnels. Cela permettrait également de disposer d’un plus grand nombre de données qualitatives à l’appui de la mise à l’échelle des initiatives BIOPAMA.
Quelle stratégie sera utilisée pour la mise en œuvre de la deuxième phase du BIOPAMA?
La stratégie de mise en œuvre s’articulera autour de 3 axes:
- Renforcement des partenariats, pour la création de l’observatoire en Afrique de l’Ouest et la consolidation de l’observatoire en Afrique centrale.
- Création de synergies avec d’autres acteurs liés au secteur de la protection de la biodiversité et de la gestion des aires protégées dans la région, mais également dans d’autres zones d’intervention du BIOPAMA, telles que l’Afrique de l’Est, les Caraïbes et le Pacifique.
- Un plan d’action, élaboré de manière participative et basé sur les besoins spécifiques de la sous-région.
Quelles sont les actions clés prévues pour la poursuite du programme en Afrique centrale?
La première étape est la signature d’un mémorandum d’accord entre la Commission des forêts d’Afrique centrale (COMIFAC), principal partenaire de la région, et l’UICN, qui produira des effets au-delà du BIOPAMA, puis la conclusion d’un accord pour la mise en œuvre de BIOPAMA.
En outre, notre priorité consiste à apporter un soutien à la COMIFAC par le biais de l’Observatoire des forêts d’Afrique centrale (OFAC) afin de:
• Développer le rapport sur l’état des zones protégées, parmi d’autres produits de la connaissance pour la protection de la biodiversité et l’amélioration de la gestion des zones protégées en Afrique centrale; ;
• promouvoir l’engagement des fournisseurs et des utilisateurs de données dans un système d’information régional efficace;
• apporter un soutien aux institutions des aires protégées aux niveaux national et régional tout en veillant au renforcement des capacités, le cas échéant;
• Promouvoir l’utilisation des données et du système d’information régional par les institutions des aires protégées aux niveaux national et régional afin d’orienter les politiques et stratégies publiques fondées sur des bases factuelles.
S’il vous plaît partagez avec nous les perspectives pour l’Afrique de l’Ouest.
La dynamique en Afrique occidentale est légèrement différente de celle en Afrique centrale. Ainsi, la première étape consiste à mettre en place l’Observatoire des Aires Protégées d’Afrique de l’Ouest en collaboration avec l’UEMOA et les acteurs de la sous-région tels que le Réseau des aires marines protégées de l’Afrique de l’Ouest (RAMPAO). Une feuille de route a déjà été élaborée à cet effet.
La prochaine étape est l’élaboration et la signature d’une charte de la gouvernance des aires protégées en Afrique de l’Ouest. Il s’agit d’une initiative qui sera soumise aux États concernés afin que les activités mises en œuvre sur le terrain s’harmonisent avec les grandes orientations politiques. Certaines activités plus concrètes sur le site seront menées dans le cadre de la mise en œuvre des EIPMFavec les agences / directions nationales responsables des zones protégées.
Existe-t-il une différence entre les deux phases du programme BIOPAMA?
Le mécanisme d’octroi de subventions est une nouvelle composante du BIOPAMA qui vise à contribuer à la réalisation des objectifs de gestion et de gouvernance par le biais d’actions concrètes mises en œuvre dans et autour des aires protégées sur la base de priorités clairement définies. Cette initiative est intéressante car elle permettra de:
- Améliorer les mécanismes de conservation à long terme et d’utilisation durable de la biodiversité et des ressources naturelles dans les zones protégées;
- Renforcer les capacités des institutions nationales concernées par les aires protégées, notamment en utilisant les résultats des évaluations pour la planification et la prise de décision;
- Soutenir les initiatives communautaires visant à renforcer les moyens de subsistance des populations locales tout en contribuant efficacement à la gestion des zones protégées.
Le premier appel à propositions va bientôt être lancé et je saisis cette occasion pour inviter les agences nationales des aires protégées, les organisations de la société civile, les municipalités, les organisations communautaires, les organisations régionales, les ONG locales et internationales.
Quel est votre message pour les partenaires BIOPAMA?
BIOPAMA est un programme prometteur, mais il est important que toutes les parties prenantes, en particulier celles qui vivent au quotidien dans et autour des aires protégées, y participent, afin d’obtenir des résultats pouvant avoir un impact à long terme.
Le message serait d’inviter toutes les parties prenantes du secteur des aires protégées et de la protection de la biodiversité à collaborer avec les observatoires régionaux afin de mettre en place un puissant système d’information permettant à tous les acteurs qui produisent des données de les mettre à la disposition des parties prenantes qui en ont besoin pour prendre des décisions. soit au niveau local, pour améliorer l’efficacité de la gestion des aires protégées, soit au niveau national, pour influencer les politiques publiques en faveur de la protection de la biodiversité. Ensemble, nous pourrons ainsi passer de la connaissance à l’action pour une planète protégée!
Biopama
Un commentaire sur “Biodiversité : 2019, quel vision pour le projet Biopama?”
Juste , je viens de tire une leçon par rapport au parcours professionnel de Madame Tanya!