La zone de mangrove autour de Douala, dénommée estuaire du Wouri, est la plus décimée avec un taux de destruction de l’ordre de 6,2% par an à cause de la pression démographique, l’urbanisation, et le développement économique de la littorale. Et ce, malgré leur énorme valeur écologique notamment, la richesse en ressources halieutiques, produits ligneux et non-ligneux et les capacités des mangroves à lutter contre le changement climatique. Cette alerte a été lancée par Abdon Awono et Lydie Flora Essamba, scientifiques au Centre de recherche forestière internationale (CIFOR).
Cette alerte intervient à deux jours de la célébration de la journée internationale pour la conservation de l’écosystème de la mangrove. « Si nous n’agissons pas, nous risquons une dégradation irréparable de cet écosystème si fragile mais si important pour la régulation climatique de cette zone littorale », signale ces scientifiques.
Ils ont également profité de cette publication, pour inviter les populations locales et autres acteurs que l’avenir des mangroves du Cameroun dépend en grande partie de la capacité de chacun dans la transformation de la filière bois énergie.
« Du gouvernement à tous les niveaux, nous avons besoin d’incitations pour les producteurs et les utilisateurs qui optent pour des options durables. Et nous, les citoyens, que nous utilisions du bois énergie comme moyens de subsistance en cuisinant ou pour satisfaire d’autres besoins énergétiques à la maison, nous devons nous intéresser à l’origine des ressources que nous consommons et à l’impact de leur prélèvement sur les écosystèmes naturels », insistent-ils.
Pour que les solutions proposées soient efficaces à long terme, cette étude propose une utilisation des matières premières locales et abordables, la création des technologies attrayantes pour les utilisateurs, et innovation avec des modèles commerciaux accessibles pouvant être disséminés à une large échelle.
« Toutes ces actions doivent également être accompagnées d’une forte sensibilisation des consommateurs de bois énergie pour favoriser le changement de comportement. C’est seulement par cette voie que les générations futures du Cameroun pourront avoir la chance de bénéficier également des nombreux services éco systémiques fournis par les mangroves », ajoutent-ils.
Signalons que depuis 2018, le Centre de recherche forestière internationale (CIFOR) travaille en collaboration avec l’Université de Douala et l’ONG Cameroun Écologie sur l’île de Manoka, et la commune du 6ème arrondissement de Douala dans son ensemble, pour promouvoir des chaînes de valeur profitables et durables du bois énergie pour protéger les mangroves de l’estuaire du Wouri.
« Nous investissons dans le développement de technologies améliorées de fumage du poisson qui peuvent aider à réaliser de grandes économies de consommation de bois, et ainsi réduire la pression insupportable sur les ressources de la mangrove et améliorer les conditions de travail des femmes. Dans le même ordre d’idées, nous promouvons des solutions énergétiques durables pour réduire la consommation de bois énergie dans les ménages à travers les foyers améliorés », conclu cette étude.
Nelphie MIE