Les experts des administrations nationales et provinciales, du secteur privé, les délégués peuples autochtones et des communautés locales, ainsi que des partenaires techniques et financiers ont mené une réflexion sur la durabilité économique des concessions forestières des communautés locales (CFCL). Cet atelier, organisé à Kinshasa du 29 au 30 octobre 2024, avait pour but de réévaluer les approches actuelles, encourager une réflexion constructive et lancer des discussions susceptibles de rajeunir le processus de foresterie communautaire en République Démocratique du Congo.
« Cet atelier nous offre l’opportunité de partager des expériences et de mettre en lumière les réussites et les défis que rencontrent les communautés dans la gestion de leurs forêts », a exhorté le directeur général en charge des forêts, Monsieur Diengo. « Je suis persuadé que les recommandations qui seront formulées contribueront efficacement à l’amélioration de la gouvernance des concessions forestières des communautés locales, afin que celles-ci deviennent un véritable levier de développement durable dans nos milieux ruraux ».
La République démocratique du Congo compte à ce jour, 228 concessions forestières des communautés locales, dans 14 provinces. Ces concessions représentent environ 4 millions six cents cinquante-huit mille hectares. Malgré les progrès enregistrés durant les cinq ans, de nombreux défis subsistent, notamment la réduction de la pauvreté des communautés locales et des peuples autochtones et l’amélioration de leurs conditions de vie.
« La gestion durable des forêts en RDC est cruciale non seulement pour les communautés locales, mais aussi pour la lutte mondiale contre le changement climatique. Cet échange entre les principales parties prenantes nous permettra de créer des modèles durables qui harmonisent le développement économique avec la gestion des forêts et la conservation de la biodiversité », a déclaré Ani Zamgochian, directeur du Programme régional pour l’environnement en Afrique centrale (CARPE) de l’USAID, en RDC
En effet, après la phase de sécurisation des concessions forestières des communautés locales, le gouvernement de la RDC reste engagé dans l’accompagnement de ce processus vers sa maturation. Selon Margot Lissenge, expert chargée de la cartographie, la phase de gestion et exploitation d’une CFCL reste tout de même cruciale afin d’en assurer le succès.
« L’Etat est tenu d’accompagner les communautés dans l’élaboration du Plan simple de gestion. L’Etat intervient également au niveau du chef du secteur qui approuve le plan simple de gestion. L’Etat intervient également dans l’octroi du permis de coupe artisanal du bois d’œuvre, mais aussi dans le suivi des activités dans la concession. Ce qui fait que l’Etat a la possibilité de suspendre une activité si elle n’est pas faite dans le respect de la réglementation », a -t-elle informé.
Au cours de ces deux jours de réflexion, les participants ont examiné les défis auxquels sont confrontées les CFC et ont fait la promotion de stratégies novatrices pour améliorer la gouvernance, impliquer le secteur privé et développer des modèles qui sont à la fois économiquement viables et écologiquement durables.
« Là où on a un petit souci par rapport aux textes c’est la question de la fiscalité et la parafiscalité. Au niveau des CFCL on n’a pas encore un régime fiscal clair. Les communautés se butent à cette réalité. Une fois qu’elles commencent les activités génératrices des revenus dans les CFCL, il y’a l’Etat qui arrive. Nous pensons que l’Etat doit promouvoir le développement local, il devrait alléger la fiscalité ou voir même exonérer certaines activités issues des CFCL », a estimé Blaise Mudodosi, coordonnateur de l’APEM.
A en croire les participants, l’atelier de Kinshasa sur la durabilité économique des CFCL trouve tout son sens, dans la mesure où il devra mettre autour d’une même table, des experts des administrations nationales et provinciales, du secteur privé, ainsi que des partenaires techniques et financiers en vue d’aider à mettre en place ou à dupliquer des modèles économiquement et écologiquement viables et adaptés aux besoins réels des communautés.
« Dans la stratégie même du gouvernement, on avait identifié l’aspect économique comme l’un des objectifs principaux de la foresterie communautaire. On voudrait que les CFCF soient un levier pour pousser le développement, et améliorer les conditions de vie des communautés. Après 5 ans, il est important de voir quelles sont les bonnes expériences, les innovations afin de s’assurer que les communautés peuvent accéder à ces différentes options et tirer de véritables bénéfices de la foresterie communautaire », a déclaré Martijn ter Heegd, expert au Programme de la biodiversité et de la Gestion durable des Forêts (BGF) à la GIZ.
Notons que les participants ont souligné l’importance d’améliorer les flux d’informations pour une gouvernance plus efficace des CFCL, en veillant à mettre en place des systèmes de communication accessibles et adaptés aux besoins actuels, ainsi qu’à renforcer les synergies nécessaires au succès de ce processus.
De plus, il a été noté que le Plan Simple de Gestion pourrait être considéré comme un outil de plaidoyer et jouer un rôle déterminant pour renforcer la participation des acteurs locaux. Ils ont également réaffirmé la nécessité de renforcer les capacités de tous les acteurs impliqués, tout en encourageant la promotion d’études intégrant les dimensions socioéconomiques et écologiques, afin de guider les actions de manière éclairée et durable.
Enfin, l’idée d’incitations fiscales adaptées au modèle économique des CFCL pourrait encourager une participation accrue, une rentabilité économique plus forte et la responsabilisation des communautés.
Il sied de rappeler que cet atelier a été rendu possible grâce à l’Activité de soutien aux forêts et à la biodiversité » (FABS) de l’USAID en collaboration avec la GIZ, dans le cadre du Programme de maintien de la biodiversité et de gestion durable des forêts, entre autres partenaires.
Alfredo Prince NTUMBA