L’ONG Juriste pour l’Environnement au Congo (JUREC) a organisé une formation des agences gouvernementales, sur « les premiers intervenants sur les scènes de crime faunique. » Cette formation s’inscrit dans le cadre de la lutte contre le trafic des espèces de faune sauvage en République démocratique du Congo. Pendant deux jours, les participants, essentiellement les services commis aux frontières, ont été outillés sur comment gérer une scène de crime. Cette formation a eu lieu du jeudi 13 au vendredi 14 juin 2024 à Kinshasa.
La formation visait à accroître les capacités des services répressifs à détecter, interdire, saisir et transférer aux organismes d’enquête les produits illégaux issus de la faune et de la flore sauvages en RDC, par la sensibilisation, la formation et l’équipement de ces services. Ces assises ont permis aux services qui travaillent autour des ports et des aéroports de se doter des capacités pour travailler au-delà de la manière dont ils travaillent d’habitude.
« Nous aimerions aider à endiguer tout ce qu’il y a comme désordre dans la lutte contre le trafic des espèces sauvages protégées. Nous continuons à vivre des cas des arrestations, des saisies ou des personnes en voie de quitter le territoire national ou en voie d’entrer au pays avec des espèces de faune et de flore sauvage protégées. C’est ça qui nous a poussé à réfléchir sur comment les services qui travaillent aux ports et aéroports peuvent être outillés avec des instruments juridiques pour qu’ils travaillent mieux. Cette fois-ci, il a été question d’apprendre à ces agents comment préserver les preuves. » A indiqué le Coordonnateur de l’ONG JUREC, Maître Félix-Credo Lilalako.
L’une des difficultés annoncées par ces agents au cours de cette formation est la falsification des permis d’exploitation. Plusieurs documents brandis par les criminels fauniques arrêtés en flagrant délit s’avèrent être faux. « Ces permis sont fabriqués en Suisse. Nous ignorons comment ils sont falsifiés pour se retrouver entre les mains des individus qui enfreignent délibérément la loi. » A expliqué un agent de l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) au cours de la formation.
Selon l’African Wildlife Foundation (AWF) qui a appuyé cette formation, 10 kits dont le coût est de 5 000 dollars américains par kit avaient été remis à la DGDA, l’OCC, la DGM et la RVA, afin de leur permettre de travailler dans les normes.
« Ces outils avaient été remis en septembre 2023. Maintenant, ils devraient apprendre à les utiliser. Notre souci est d’éradiquer complètement le commerce illicite des espèces protégées de la faune et la flore sauvage en RDC. Il y a une appropriation de cette question par les agents qui travaillent aux frontières. Cela n’était pas constaté auparavant. Ces agents nous affirment que grâce aux techniques apprises, beaucoup de cas sont maintenant appréhendés. 10 ou 15 kg d’ivoire sont actuellement entre les mains de la DGDA. Nous avons reçu cette information avant de commencer notre formation. » A éclairé Me Joe Kasongo, Senior Legal Officer de AWF.
De la théorie à la pratique
Au cours de cette formation, une démonstration de la gestion de la scène de crime a été faite par les apprenants, grâce au matériel fourni par l’AWF. Des kits dont devraient disposer les agents commis aux frontières en vue de mener à bien leur travail mais le manque de volonté politique pour aider lesdits agents à acquérir ces matériels a favorisé la divagation de plusieurs criminels fauniques au pays. « Un OPJ est l’œil et les bras du Ministère public. Si un travail est fait en amont, le Ministère public n’aura pas beaucoup de problèmes. C’est pourquoi, ils ont l’obligation d’avoir des connaissances sur la gérance de la scène de crime. Ils doivent bien les gérer pour que les enquêtes aboutissent. Souvent les enquêtes n’aboutissent pas à cause des erreurs des OPJ. C’est la justice qui élève une Nation. Donc, l’appareil judiciaire doit être renforcé. Là il nous manque une caméra 3D pour permettre aux OPJ de fixer la scène de crime. Pourtant, ça ne coûte pas plus de 60 mille dollars. » S’est indigné l’Expert en Sciences forensique, Clément Ngonde.
Pour sa part, Feza Mubi, agent à l’aéroport de N’djili pour la DGDA et participante à ces séries de formation a estimé que ces connaissances sont très nécessaires dans l’exercice de son travail. Ainsi, elle pense que cela devrait continuer. « Ces formations devraient atteindre un bon nombre d’agents qui puissent être renforcés en capacités afin qu’ils soient plus efficaces sur le terrain. Nous demandons à nos autorités de voir dans quelle mesure nous doter de matériels qui manquent car ces organisations extérieures qui nous soutiennent ont déjà fait leur part. » A-t-elle recommandé.
Notons que ces travaux ont été appuyés par l’AWF, avec le financement du bureau pour le trafic de drogue international et le respect des lois (INL). La 1ère série de ces formations avait consisté à donner le cadre juridique général sur la protection de la biodiversité. Après cette série, l’heure était à la pratique. D’où, la raison d’être de cette 2e série.
Sarah MANGAZA