Deux communautés du Territoire de Kiri, dans la Province de Mai Ndombe ont bénéficié des arrêtés leur attribuant deux Concessions de Forêts des communautés locales (CFCL). Ces arrêtés accordent la jouissance perpétuelle aux communautés de Booke et Mpegolondo. Cinq jours après la signature symbolique de ces arrêtés par le gouverneur Rita Bola, c’est le déclenchement d’une véritable guerre des tranchées entre les notables de ce territoire.
Un processus biaisé
Si pour les uns ces arrêtés violent la réglementation en la matière, car n’ayant pas suivi le processus établi, les autres par ailleurs dénoncent un conflit d’intérêt et les manœuvres dilatoires pour n’est pas permettre aux communautés bénéficiaire de tirer profit de leurs ressources forestières.
« A bien voir les choses, c’est cette dynamique de Peuples autochtones qui a recruté quelques pygmées. Comment peut-on disposer de forêts sans que nous soyons informés correctement ? », s’interroge Tresor Marius Boleko, membre de l’élite du Mai Ndombe et ancien ministre de l’Environnement de Mai Ndombe.
A l’en croire, ce processus ayant conduit à l’attribution de ces concessions des forêts des communautés n’a pas obtenu le CLIP (Consentement libre éclairé et préalable) des différentes parties. Cela peut déboucher sur un conflit intercommunautaire si l’on ne tient pas compte de la réalité sociologique qui existe depuis leurs ancêtres.
« Il y a des raisons cachées et de risques potentiels si ces arrêtés ne sont pas attaqués », affirme-t-il. « La DGPA voudrait accréditer la thèse selon laquelle, les pygmées ont été dépossédés de forêts. Ce qui est faux ! Cette attitude risque d’énerver les us et coutumes ».
Ce notable de Kiri dénonce également le moment choisi et le lieu de la signature de ces arrêtés. Selon lui, il s’agit d’un moment suspect du fait que ce soit à la fin de son mandat, que le gouverneur décide de signer ces arrêtés à Kinshasa, une ville qui ne fait pas partie de sa circonscription juridictionnelle.
« Le gouverneur a passé plus ou moins 3 ans dans le Mai-Ndombe. Aujourd’hui, elle expédie les affaires courantes, ce n’est pas le moment de laisser de conflits intercommunautaires, car Mai-Ndombe est une province fragile. On a connu Yumbi, Lokande sociale et Mobondo. Le remède est le retrait pur et simple de ces arrêtés. Et que la DGPA soit déclarée personae non grata. Au cas contraire, nous allons attaquer ces arrêtés en justice », a conclu Monsieur Boleko.
Conflit d’intérêt et volonté d’enfreindre le développement
Tous ces arguments développés par Trésor Marius Boleko ont été battus en brèche par un autre notable de ce territoire. Rodrigue Empoke, également ancien ministre de l’Environnement de la Province du Mai ndombe voit en cette prise de position, une volonté manifeste d’enfreindre le développement de ces communautés locales et peuples autochtones de Booke et Mpengolondo.
« La procédure d’octroi de ces concessions des forêts des communautés a été suivie correctement. Contrairement à ce que les autres ont dit. Madame le gouverneur avait même initié des enquêtes publiques pour se rassurer que ces concessions ne soient sujettes à conflit. Les résultats de ces enquêtes ont été affichés pour que tout celui qui peut s’y opposer le fasse, raison pour laquelle le gouvernement a pris du temps pour signer ces arrêtés », a-t-il informé.
Rodrigue Emponke a tout de même déploré le fait que ces personnes qui s’appellent l’élite de Mai Ndombe s’adonnent aux actions anti-développement de cette même province. Et, pourtant, on ne les a jamais vu venir avec un quelconque projet de développement pour ces communautés qu’ils prétendent défendre.
« Ce groupuscule des notables qui sont venus défendre nos communautés n’ont pas reçu mandat. Parmi ces gens, qui peut se prévaloir d’avoir reçu mandat de la communauté ? », a-t-il questionné. « Il y a un conflit d’intérêt. Les mêmes forêts ont été l’objet des arrêtés qui ont valu même des fonctions ».
L’ancien ministre de l’Environnement évoque même la révocation de Trésor Marius Boleko aux fonctions du ministre provincial de l’Environnement pour avoir induit en erreur l’ancien gouverneur de Mai-Ndombe.
« L’ancien gouverneur Mputu Paul avait signé des arrêtés, et la société civile est montée au créneau pour dénoncer la procédure qui n’a pas été suivie. Ces arrêtés ont été annulés. N’est-ce pas Marius Boleko qui les avait préparés ? Aujourd’hui, on peut dire que l’ancien ministre de l’Environnement est un voleur qui crie au voleur ? », s’est-il indigné.
Toute cette saga met en lumière la difficulté que connaît le processus de la foresterie communautaire en République démocratique du Congo. En attendant le dénouement de cette situation, les observateurs de ce débat recommandent qu’une enquête indépendante soit diligentée sur le terrain et qu’un dialogue entre les notables et les communautés soit organisé afin de lever tout équivoque sur ces deux arrêtés attribuant les concessions forestières aux communautés de Booke et Mpengolondo.
Alfredo Prince NTUMBA