Field Legality Advisory Group (FLAG) a publié ce mercredi 06 mars, l’Index 2022 du suivi environnemental par les Organisations de la Société civile dans le bassin du Congo. Ce rapport régional porte sur le travail des OSC au Cameroun, en RDC et au Gabon. La prochaine édition pourrait intégrer la République du Congo.
Pour Jean Cyrille Owada, directeur des programmes, FLAG, la société civile constitue un acteur majeur dans la gestion des ressources naturelles dans le bassin du Congo. Les actions de suivi et d’analyse de la gestion des ressources naturelles qu’elle mène sur le terrain, contribue à la mise en œuvre des politiques et législations en la matière.
« Seulement les initiatives consistant à évaluer le niveau de contribution de cet acteur à une gestion efficace des ressources naturelles sont très rares. C’est pour combler ce manque que Flag a initié depuis 2019, la publication annuelle de l’index de suivi environnemental par les organisations de la société civile », a-t-il précisé.
En tant que rapport à vocation régionale, l’édition 2022 de l’Index a basé son analyse sur dix critères objectifs et pertinents répartis en deux piliers à savoir le pilier opérationnel, et le pilier environnement de travail. Téléchargez l’index ici
Au titre du pilier opérationnel, cette analyse a démontré qu’au Gabon, 30% des OSC ont réalisé au moins 4 actions de suivi, tandis qu’en RDC et au Cameroun, la proportion est respectivement de 40% et 50%.
Toutefois, ces proportions matérialisent l’insuffisance, voire, une diminution des actions de suivi par les OSC au cours de l’année 2022 par rapport à l’année 2021 au cours de laquelle ces proportions se trouvaient à 70% et à 50% respectivement en RDC et au Cameroun.
Pour Serge Bondo de la RDC, « cette situation est surtout due aux problèmes sociopolitiques du pays, avec un changement du gouvernement qui est entretenu dans l’entre-temps, et les différents problèmes liés aux conflits armées qui ont fait que les OSC n’ont pas eu le temps et les moyens nécessaires pour mener leurs actions », a-t-il précisé.
L’index 2022 révèle cependant que la majorité des Organisations de la société civile enquêtées en RDC travaille essentiellement avec les données internes qui n’ont souvent pas fait l’objet de publication. Leurs activités de suivi sont axées sur les entreprises forestières à hauteur de 50%, 20% pour l’administration, 10% pour les OSC, 10% pour les artisanaux et 10% pour la société. On note donc un intérêt accru sur les entreprises forestières au détriment d’autres entités.
Ce rapport renseigne encore que sur le plan de la légitimité, 60 % d’OSC de la RDC disposent d’un F92 (récépissé au dépôt de la personnalité juridique). Par ailleurs, 40% d’OSC ont un Arrêté du ministre de la Justice qui leur accorde la personnalité juridique. Ce résultat démontre que la situation est encore préoccupante parce que toutes les ONG devaient avoir l’arrêté pour clore le processus de reconnaissance afin d’avoir plus de légitimité quand il faut poser les actions de suivi.
Au sujet de l’impact des actions des OCS sur les décideurs, le rapport révèle qu’au cours de l’année 2022, les OSC de la RDC ont engagé 3 à 4 initiatives d’influences, cependant, le résultat est préoccupant et n’a pas eu d’impact pour changer le point de vue des décideurs.
« Aussi, il faut relever que par rapport à l’année 2021, ce résultat est en baisse. C’est une situation qui dénote de la faiblesse d’OSC qui n’a pas la capacité d’apprécier l’efficacité de leurs interventions et doit être corrigée rapidement », peut-on lire dans cet index. « Comparativement en 2021, la collaboration des OSC avec les décideurs n’est pas au bon fixe. Les recommandations formulées par les OSC ne sont pas prises en considération. Les deux parties n’arrivent pas à se mettre d’accord sur les réformes en cours dans le secteur forestier. Ce qui fait que les propositions d’OSC sont souvent prises comme une attaque envers ces autorités ».
Toutefois, le travail des OSC en RDC reste très marqué par l’engagement des acteurs, malgré les difficultés et contraintes d’ordre technique et financier. « En RDC, le pilier Opérationnel régresse légèrement passant ainsi de l’ordre de 5,62 à 5,54; et le pilier Environnement de travail en courbe descendante également passe de l’ordre de 5,64 à 5,25 », renseigne cet index.
Malgré leur insuffisance, les actions de suivi des OSC du Gabon, du Cameroun et de la RDC couvrent plusieurs segments de la chaîne d’approvisionnement à l’instar de l’attribution des titres forestiers et de la production du bois d’œuvre. Il est souhaitable que les OSC s’investissent encore plus dans le suivi de la transformation, de la commercialisation et du transport du bois d’œuvre. En outre, il est recommandé de s’intéresser encore plus à l’administration en tant qu’entité chargée de l’octroi des permis d’exploitation de la ressource.
« Il reste encore des défis majeurs, par rapport au financement et autres ressources notamment matériel », a informé Monsieur Bondo.
Rappelons que FLAG est une association de droit camerounais qui œuvre pour la transparence et la légalité dans la gestion des ressources naturelles dans le bassin du Congo depuis une décennie. La publication de l’Index s’inscrit dans le cadre du projet Technologies innovantes pour lutter contre l’exploitation illégale du bois : mise à l’échelle des plateformes d’identification de transparence de bois. Ce projet est mis en œuvre depuis 3 ans, avec le financement de l’Agence norvégienne pour la Coopération et le Développement (NORAD), et l’accompagnement technique de World Resources Institute (WRI).
Alfredo Prince NTUMBA