Forêt : Les activités du Fonds forestier national s’apparentent-elles à l’escroquerie dans le Grand Katanga ?

C’est un pavé dans la marre, la situation qui prévaut actuellement dans les provinces minières du Haut-Katanga et du Lualaba. Une situation qui ressemble à une escroquerie à grande échelle perpétrée à l’endroit des organisations de la société civile par l’Antenne provinciale (Grand Katanga) du Fonds Forestier National. En effet, le directeur-coordonnateur de cet établissement aurait donné sa parole aux différentes organisations partenaires du FFN de préfinancer les activités de reboisement dans ces provinces, pour la campagne 2023-2024 en attendant l’aboutissement de procédures de financement à la Direction Générale. Mais hélas, l’homme n’a jamais tenu sa promesse à un mois de la clôture de la phase de mise en terre.

« Nous avons monté les dossiers en fonction des orientations venant du FFN-Katanga. Ça fait 7 mois que les dossiers ont été introduits. Quand nous sommes arrivés au moment d’implanter les pépinières, à l’issue d’une réunion, le FFN-Katanga nous a dit que le financement est certain, nous vous encourageons à préfinancer les premières opérations, le temps que l’argent arrive », a renseigné une source dans le Lualaba.

Dans la même province, l’ONG Ensemble pour l’environnement a également préfinancé la mise en place d’une pépinière de plus de 13 000 plantules. Faute de moyens, Mickael Rend, coordinateur de cette organisation craint voir tout cet effort être anéanti, à l’approche de la saison sèche dans cette zone.

« Nous craignons que ces plantules soient perdues », déplore-t-il. « Nous avons écrit au gouvernorat pour nous aider à initier la campagne une parcelle un arbre afin de pouvoir vider notre pépinière. Mais, ça traîne encore. Nous espérons avoir même les maigres moyens du FFN pour mettre en terre ces plantules ».

Point de vue soutenu par Omer Kabasele, coordonnateur national de l’ONG de Green World Solidarity qui supervise ce projet de reboisement qui ne cache plus son incertitude sur cette situation qui risque de dégénérer, si rien ne se fait urgemment par la Direction Générale. « Il y a des engagements que nous avons pris avec des banques pour préfinancer et d’autres partenaires ce projet, avec l’espoir de recevoir au plus vite le financement du FFN et régler la situation budgétaire, malheureusement ça n’arrive toujours pas. Toutes ces choses font que l’incertitude et l’inquiétude soient croissantes. Pendant ce temps, on continue avec la mise en terre des plantules, toujours sur préfinancement. D’où la nécessité pour nous de demander à la direction générale de débloquer le financement », s’est-il indigné.

Dans le Haut-Katanga par exemple, au total, 98 000 plantules ont été produits pour couvrir 157 hectares. A ce jour, 52 hectares ont déjà été reboisés, ce qui représente 94.000 dollars américains que le Fonds Forestier national doit rembourser à ces organisations. De l’argent préfinancé dans l’implantation de pépinières, achat des semences, main d’œuvre et autres activités préliminaires.

Lors du lancement de ce projet en 2022, le DG avait envoyé son représentant, son directeur technique. Celui-ci a déclaré devant les autorités provinciales, la société civile et les cadres du FFN Katanga que son institution devrait accompagner le projet de reboisement de ces deux provinces minières sur 3 ans successifs pour atteindre des résultats durables.

« La première campagne était de 2022-2023. Dans le Haut Katanga, nous avons reboisé dans les six territoires qui constituent la province.  Il y a des structures qui ont aussi reboisé dans le Lualaba. C’est la toute première fois dans l’histoire de ces provinces. Cette action a redoré l’image ternie du FFN dans ces provinces où la société civile à aider à l’implantation du FFN, a vulgarisé ses attributions et l’accompagne dans la maximisation de recettes. Nous continuons à croire en la sincérité de l’engagement du DG réitéré en marge de la Cop28, engagement de continuer à financer les opérations de reboisement à travers le pays et c’est le temps de le concrétiser », a renchéri Monsieur Kabasele.

Par le passé, face à ce qui s’apparente à une véritable escroquerie de la part du FFN, le gouverneur Panda Kapopo avait finalement levé l’option de chasser le représentant de cet établissement public dans le Haut-Katanga. Le Fonds Forestier National serait connu comme une institution qui perçoit des taxes et rétrocessions et ne s’acquitte jamais de ses devoirs, notamment celui de financer les reboisements pour réparer ce que les miniers ont détruit, et pour lequel ils ont payé cher, image que l’actuel DG avait bien commencé à changer à son arrivée à la tête de cette institution.

« Jusqu’à aujourd’hui, le fonds de rétrocession que la province doit donner au FFN, elle ne la donne pas », a indiqué une source au sein de l’administration provinciale. « Parce que la province n’est toujours pas convaincue du bon fonctionnement en termes de financement des opérations de reboisement. Il y’a beaucoup des millions qui entrent mais en retour les choses ne sont pas très claires ».

Selon les experts, les provinces du Haut-Katanga et de Lualaba connaissent une destruction forestière hors norme. L’exploitation minière n’épargne absolument rien. Après avoir payé leurs taxes notamment auprès du Fonds forestier national, les entreprises minières se dédouanent du reste. Car, l’argent versé à ces différents services étatiques devra servir à financer le reboisement et la réparation des dégâts causés à l’environnement.

Sur le terrain, les choses ne semblent pas marcher de la sorte, estiment les observateurs. Plusieurs acteurs contactés sur place affirment que l’argent perçu par le FFN auprès des miniers ne correspond nullement aux activités de reboisement qu’il est censé financer. « Il n’y a pas de proportions entre la destruction et la restauration des forêts ».

Notons par ailleurs que le Grand Katanga est parmi les grands contributeurs du Fonds forestier national. Rien que pour l’année 2022, le FFN aurait mobilisé plus de 11 millions de dollars américains, en termes des recettes, renseigne un article de presse consulté par Environews RDC.

Alfredo Prince NTUMBA

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