« Toute entreprise ayant obtenu des droits d’exploration et d’exploitation des enchères pétrolières en République Démocratique du Congo court un risque de se retrouver sans protection financière dans les prochaines années », c’est ce qu’a révélé un rapport publié récemment par Greenpeace Afrique. Les analyses des experts de ce groupe indiquent que les compagnies pétrolières auront du mal à trouver une couverture pour leurs plans d’affaires destructeurs sur le plan environnemental et social en RDC. Le résultat de ce rapport a été rendu public ce dimanche 08 septembre à Kinshasa.
« La RDC n’a pas la capacité nationale de fournir une assurance pour la prospection pétrolière et le risque élevé qu’elle implique. Par conséquent, les entreprises qui obtiennent des droits d’exploration s’appuient très probablement sur les services de certaines des plus grandes compagnies d’assurance et de réassurance du monde, principalement concentrées en Europe et en Amérique du Nord», peut-on lire dans ce communiqué dont Environews-RDC s’est procurée une copie.
L’assurance et la réassurance pour les blocs pétroliers ne seront pas les seules contraintes auxquelles les entreprises soumissionnaires auront à faire face. La plupart des sites sélectionnés pour les appels d’offres abritent des parcs et aires protégées. Certains de ces lieux sont considérés comme des patrimoines mondiaux de l’Unesco et sites RAMSAR.
« Les entreprises qui prévoient d’extraire du pétrole en RDC, y compris dans une zone de guerre, sont prêtes à sacrifier la biodiversité mondiale et les objectifs climatiques, et à ignorer les droits des peuples autochtones et des communautés locales, ainsi que les préoccupations relatives à la corruption et à l’illégalité. Notre analyse montre que les plus grands assureurs et réassureurs sont réticents à souscrire et à apporter un soutien essentiel à une extraction néocoloniale aussi désastreuse », a déclaré Irène Wabiwa, responsable internationale de la campagne du Bassin du Congo de Greenpeace Afrique.
Les champs pétroliers du Congo deviennent rapidement non assurables
Sept des 20 plus grandes compagnies d’assurance non-vie sur les combustibles fossiles au monde ont explicitement exclu la prospection et l’extraction pétrolières en RDC de leur couverture. Les sociétés de réassurance Munich Re, Hannover Re, Swiss Re et SCOR ayant collecté ensemble plus de 40 % des primes brutes émises en non-vie dans le monde en 2021 ont retiré leur capacité de réassurance. Certaines entreprises ont indiqué être soumises à des restrictions.
« Ce déséquilibre aura des conséquences sur les coûts de réassurance des entreprises telles que Perenco désireuses de faire une offre pour des droits d’exploration dans les blocs pétroliers très problématiques de la RDC. Le rapport est publié avant le Rendez-Vous de Septembre (RVS), l’un des plus grands rassemblements mondiaux du secteur de la réassurance, qui se tiendra du 9 au 13 septembre à Monaco. Un responsable de la communauté congolaise de Muanda (où Perenco est déjà accusé de pollution grave) sera présent, ainsi que des militants de Greenpeace. Ils demanderont à AIG, Allianz, Axa, Berkshire Hathaway, Chubb, Fairfax Financial, Liberty Mutual, MAPFRE, Travelers et Lloyds of London de s’engager fermement à ne pas soutenir l’exploitation du pétrole et du gaz en RDC », ont relevé les analyses des experts de Greenpeace.
Les lignes de ce document font également état des avertissements de scientifiques de renom concernant les impacts sur la biodiversité et le climat qui sont en jeu, ainsi que des préoccupations liées à la corruption, à l’illégalité et à l’instabilité politique dans le pays.
«Toute compagnie d’assurance et de réassurance qui opterait pour le profit à court terme au détriment du climat mondial, de sa biodiversité et des communautés habitant la forêt tropicale, y compris dans les zones de guerre, serait complice de crime avec les entreprises qui soumissionnent pour le pétrole », a déclaré Lindsay Keenan, coordinatrice européenne de la campagne Insure Our Future.
Signalons que cette structure a annoncé accompagner des manifestations dignes, paisibles et d’intérêt communautaires pour le 11 blocs pétroliers dans la province du Tanganyika vers fin septembre et début octobre 2023. A ce jour aucune organisation de la société civile locale n’a déclaré être au courant des appels d’offres dans deux de 11 blocs pétroliers situés dans la province du Tanganyika. Certaines communautés ont exprimé à Greenpeace Afrique lors de sa récente visite leur crainte de voir les écosystèmes dont ils dépendent être pollués.
Albert MUANDA