Les statistiques de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture actualisées ont révélé que 420 millions d’hectares de forêts ont disparu dans le monde entre 1998 et 2020, soit 10 % des forêts mondiales restantes et plusieurs activités sont à l’origine de cette catastrophe. Aujourd’hui par exemple, la culture du tabac, des caoutchoucs, du colza et de Soja pour nourrir le bétail et d’autres fins en Europe sont loin d’être « écologiques ». Ces agricultures demandent plus de terre à déforester et plus de pesticides à envoyer en l’air. Le phénomène concerne aussi les biocarburants car cette évolution entraîne, donc, paradoxalement, plus de déforestation des forêts tropicales plus particulièrement d’Amérique et de l’Afrique.
Il résulte de différents facteurs inquiétants, comme celui-ci : dénoncée par les ONG environnementales comme destructrice de forêts et de biodiversité. « En première ligne de la destruction de ces écosystèmes, l’expansion agricole et l’élevage, responsables à 88,5 % de leur disparition à travers le monde, principalement en Amérique du Sud et en Afrique. L’Europe doit prendre des mesures ambitieuses contre la « déforestation importée », a rapporté Joël Ntumba, expert congolais sur les questions environnementales
Quant n’est-il des politiques de reboisements massifs européens ?
L’Union européenne a mis en place des politiques de reboisements massifs permettant de lutter contre la déforestation. Mais les accords de libre-échange et les modèles actuels d’élevage et de consommation déplacent le problème. L’Europe par conséquent réduit consciemment son empreinte carbone du continent.
« Nos importations de soja du Brésil, par exemple, sont une catastrophe pour la forêt amazonienne. Comme l’Union européenne est fondée sur la liberté du commerce, sacralisée dans ses traités comme une fin en soi, il lui est inconcevable d’éradiquer l’importation de produits dont la fabrication a nécessité la déforestation, à l’instar des bovins et du soja. Elle ne peut pas non plus renoncer à des accords de libre-échange scandaleux tels que le Mercosur, muet sur la déforestation de l’Amazonie, ou celui qu’elle négocie actuellement avec l’Indonésie, dont les forêts sont détruites pour laisser place aux cultures d’huile de palme », a déclaré Emmanuel Maurel, membre du groupe de la gauche unitaire européenne.
Selon le Fonds mondial pour la nature (WWF), les importations de l’Union ont été à l’origine de la destruction d’environ 3,5 millions d’hectares de forêts tropicales entre 2005 et 2017, et du rejet de plus de 1,8 milliard de tonnes de CO2. L’équivalent de 40 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre de l’Union. La crise économique du continent inquiète certains scientifiques parce que les pays vont chercher à remonter leurs économies par voies import et export.
« Le dispositif pour prévenir le phénomène ne sera pas solide parce qu’il faut prévoir l’interdiction de ces cultures, avec les mécanismes de mise en œuvre et de contrôle appropriés de la production de cacao, du café, de l’huile de palme, de soja et bois obtenus par la déforestation. Il faut limiter la responsabilité en se frayant un chemin entre le credo libre-échangiste et la préoccupation environnementale », a renseigné Joël Ntumba, expert congolais sur les questions environnementales.
L’Europe rappelée au respect des accords et textes sur le climat
D’une part, il demeure trop limité pour enrayer la complicité de l’Union avec la déforestation car les productions les plus « déforestantes » importées en Europe tabac, caoutchouc, maïs et autres oléagineux comme le colza restent à ce jour absentes du champ d’application.
« D’autre part, il devient de plus en plus difficile aux puristes de la mondialisation de résister à la pression des écologistes et des mobilisations citoyennes. Les accords des conférences des parties tiennent une définition restrictive de ce qu’est une forêt, car la destruction à des fins d’exploitation économique relâche elle aussi des milliards de tonnes de CO2 dans l’atmosphère », peut-on lire sur le communiqué du Giec.
Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a récemment rappelé l’urgence de la situation : l’heure n’est plus aux petits pas.
« L’Union européenne a donc l’obligation d’être plus ambitieuse. Nous sentons bien qu’un nouvel âge de la mondialisation doit advenir, celui de la souveraineté alimentaire et de la neutralité carbone. Pour ce qui me concerne, entre mettre en danger la mondialisation libérale, avec ses profits substantiels, et les générations futures, le choix est fait », s’alarment les experts.
Signalons qu’une proposition de règlement pour l’importation de produits « zéro déforestation », a été présentée en novembre dernier par la Commission européenne pour lutter contre la déforestation importée au sein de l’Union. L’adoption de ce règlement est pour le moment encore au stade de négociation en commission. Les défenseurs de l’environnement exigent l’élargissement des champs d’application pour que ce texte marque une vraie étape dans la lutte contre la déforestation.
Albert MUANDA