Depuis plusieurs années, la production et la gestion des déchets restent une problématique importante dans la détérioration de l’environnement à Kinshasa. Appelée auparavant Kinshasa la belle, la Capitale congolaise est aujourd’hui Kinshasa la poubelle, un qualificatif lui attribué, à cause de la présence constante des ordures dans ses rues. Depuis, des initiatives voient le jour, pour relever ce défi.
À l’Université de Kinshasa par exemple, les étudiants s’organisent dans leurs facultés pour collecter et gérer les détritus produits durant la journée. Pour mieux le faire, des mécanismes de contrôle du circuit de gérance des déchets ont été mis en place par les autorités académiques.
“La politique des gestions à l’Université de Kinshasa est assise. Les autorités académiques ont mis en place des mécanismes pour contrôler les circuits de gestion des déchets dans ce plan directeur d’assainissement du site universitaire”, a indiqué Bertin Mbuya, ministre de l’Environnement et développement durable de la coordination estudiantine de l’UNIKIN.
Le plan directeur d’assainissement est un document produit par le secrétariat général administratif. Il retrace les actions prioritaires pour maîtriser les circuits des déchets sur ce site.
Ce plan directeur d’assainissement prévoit la mise sur pied d’assainissement dans chaque faculté, pour mener à bien ce programme. La notion est aussi adoptée pour tout résident du site. Photographes, opérateurs économiques et de saisie mettent la main à la pâte.
Tout s’organise
Chaque matin l’équipe de Luwambo Ipama Samuel est à pied d’œuvre. Munis des Balais, râteaux, pioches et brouettes, ces hommes et femmes enfilent leurs gilets jaunes, bottes et cache-nez. L’exercice consiste à rendre propre les artères du site universitaire. Les sachets, papiers et autres déchets traînés sur la chaussée sont ramassés, et triés avant d’être évacués.
“Notre travail consiste à collecter les déchets plastiques dans les auditoires. Nous les trions. Pour les déchets plastiques, c’est l’usine Kintoko qui vient parfois les prendre pour les transformer”, a expliqué, le superviseur de l’ONG Action for Health and Environment.
Avec plus de 25 000 étudiants par jour, le site de l’UNIKIN est une aubaine pour les marchands. Les petits échanges commerciaux y sont faits régulièrement. Ces activités humaines ne sont pas sans conséquences.
“Notre rôle au sein de l’UNIKIN consiste tout simplement à sensibiliser nos clients. Très souvent, ils ont toujours des bouteilles en main quand ils viennent prendre des photos, nous leur disons de les mettre dans des poubelles”, a précisé Djony Ntabilangana Mukendi, vice-président de l’association des photographes de l’Unikin.
Conscients du défi de gestion des déchets sur ce site, des étudiants s’emploient à y apporter des solutions innovantes. C’est le cas de la poubelle de Bob fabriquée à base des bouteilles PET assemblées avec des bars de fer, et des fils de recuit. C’est un récipient très particulier de collecte des bouteilles en plastique. Ce dispositif dénommé POUBOB du nom de son inventeur, peut contenir jusqu’à 13 kilos de bouteilles soit un volume d’environ 540 litres.
“J’ai constaté qu’au sein de notre site universitaire, les déchets sont partout. Dans les compositions de déchets, il y a des déchets qu’on recycle un peu facilement comme les HDT les sachets de basses densités et de hautes densités tandis que ce sont les déchets plastiques PET qui dominent le site et nous n’avons pas une technologie de transformation de déchets. C’est ainsi que j’ai poussé la réflexion pour fabriquer à partir de mon mémoire un récipient de recueillement des déchets”, a renchérit, Bob Bobo Benza, environnementaliste et inventeur.
L’autre étape de lutte contre la pollution plastique au campus de Kinshasa consiste à recycler les déchets plastiques HDT et PET afin de leur donner une seconde valeur.
C’est derrière la Faculté des sciences que ce travail se fait. Après le ramassage et le tri, les bouteilles et sachets plastique sont transformés en pavés écologiques.
“Généralement, nous commençons par des collectes de toutes sortes de sachets qui se produisent ici. Cette fois-ci nous avons utilisé les étudiants dans le cadre de leur stage. Après cela, on passe à la fusion de ces sachets dans une marmite chauffée “, a déclaré Weya Mazikeni Alpha, chef des travaux au Département des sciences de l’environnement. “Quand nous obtenons la première pâte homogène de ces déchets, nous y ajoutons un peu de sable pour consolider cela. Et nous obtenons la deuxième pâte homogène avant de la couler dans des moules disposés sur des tables à couler “.
L’atelier a depuis le récent affrontement entre étudiants et policiers perdu la grande partie de ses matériels. La chaîne de production est presque rompue. Cette situation pénalise le responsable du centre de recyclage universitaire à faire son travail.
“Tous ces déchets sales, on devrait les laver malheureusement tout ce que nous avons comme équipement ont été emportés par les badauds de Mbanza-Lemba lors des émeutes qu’il y a eu récemment sur le site universitaire. C’est pourquoi nous demandons si l’Université peut nous n’aider pourquoi pas la ville de Kinshasa parce qu’il y a des enfants qui viennent nous vendre ces sachets donc nous contribuons indirectement à Kin bopeto”, a-t-il poursuivi.
L’atelier des étudiants en sciences de l’environnement n’est pas le seul à s’intéresser à ces déchets. Nous avons 15 minutes de marche pour rejoindre un autre centre de recyclage. Cet espace inhabité a été octroyé à la société Congo salubrité. L’entreprise a son siège à Limete. À l’Unikin, c’est un nouveau défi que compte relever le propriétaire.
“Dans cet espace, nous allons faire une gestion de proximité des déchets. Nous allons placer notre unité pour collecter toutes sortes de sachets. Le nombre d’étudiants pose un problème pour la gestion des déchets, nous allons travailler pour résoudre ce problème mais aussi aider les étudiants dans leurs recherches de fin d’étude”, a informé Américain Kakonde Tshikololo, responsable de la société Congo salubrité.
Kinshasa produit plus de 10 000 tonnes de déchets par jour. La pollution demeure un sérieux problème pour la population kinoise du fait que la ville ne dispose ni d’une politique, moins encore d’un plan de gestion intégrée des déchets. L’université de Kinshasa se démène à trouver des solutions dans la gestion de ses déchets. A en croire les autorités universitaires, la nouvelle autorité urbaine devrait s’investir en ce qui concerne les mesures préventives, et impopulaires pour redorer l’image ternie de la capitale d’une grande nation au cœur de l’Afrique.
Ce reportage a été réalisé grâce au soutien de INTERNEWS RDC.
Silas MUNGINDA et Nelphie MIE