Conservation : Le parc national de Kahuzi Biega et le défi de la cohabitation avec les peuples autochtones pygmées

Le parc national de Kahuzi Biega (PNKB), dans la province du Sud-Kivu (RD Congo), est l’un des aires protégées qui connaissent des problèmes de cohabitation avec les communautés riveraines. Cette aire protégée de l’ICCN (Institut congolais pour la Conservation de la Nature) a été souvent au cœur des conflits récurrents de cohabitation entre les peuples autochtones pygmées et le parc.

Au cœur de ce conflit, se trouve la fameuse question de dépossession des communautés pygmées de leurs terres ancestrales, sans en être indemnisées.

Dans une interview exclusive accordée à Environews TV, le directeur provincial de l’ICCN Sud-Kivu, et directeur du parc national de Kahuzi Biega, Dedieu Byaombe a éclairé l’opinion sur l’origine de ce conflit et la solution qui a amené le parc les peuples autochtones pygmées à cohabiter.

« Je suis d’accord lorsqu’on dit que les pygmées sont riverains de Kahuzi Biega. Mais pas d’accord lorsqu’on dit qu’ils ont été chassés de Kahuzi Biega », a indiqué Monsieur Byaombe. « En 1970, quand le parc a été créé, comme c’est une aire protégée de catégorie 2, on a interdit l’accès aux ressources aux peuples autochtones pygmées. Dire qu’ils ont été déguerpis, je dis non !».

L’humanisme comme solution efficace

L’humanisme est le 3ème pilier de la politique de l’ICCN. Cette politique menée par l’actuel comité de gestion de cet établissement public, veut remettre l’homme au centre de tout effort de conservation. Pour ce faire, la conservation communautaire se présente aujourd’hui comme une solution qui permet de conserver pour et par l’homme. Les peuples pygmées autour de ce parc font partie intégrante de cette stratégie.

« Nous travaillons pour améliorer les aspects socio-économiques de ces communautés. Il y’a des activités alternatives qui sont en train d’être développées, notamment l’élevage, l’agriculture durable etc. Nous venons de distribuer des semences améliorées à plus de 8 mille ménages », a précisé le directeur provincial de l’iCCN.

Le chef de site de Kahuzi Biega a par ailleurs déploré la manipulation dont sont victimes certaines familles de pygmées, qui servent de bouclier pour les groupes armés qui opèrent dans ce parc.  

Scolariser les enfants pygmées

Parmi les solutions qui renforcent la cohabitation, il y a notamment la collaboration franche entre le parc et les communautés pygmées autour de celui-ci. Cette collaboration a permis à ce que le parc national de Kahuzi Biega puisse promouvoir la scolarité des enfants pygmées.

« L’année passée, nous avons scolarisé près de 700 enfants pygmées. Le parc a payé les frais scolaires du primaire jusqu’à l’université. Actuellement, nous sommes au cap des 1500 enfants pygmées scolarisés », a informé le chef de site.

Cette approche favorise l’émergence d’une nouvelle classe de ce peuple longtemps marginalisé. « Aujourd’hui, si vous demandez au pygmée, ils vous diront qu’il n’y a pas de problème avec le parc. Nous avons mis en place ensemble, un cadre de dialogue qui nous permet chaque mois de nous réunir et de discuter de nos besoins », a-t-il rassuré.

Notons par ailleurs que le parc national de Kahuzi Biega est situé à cheval sur le Rift Albertin et le Bassin du Congo. Il est un habitat exceptionnel pour la protection de la forêt tropicale et des gorilles des plaines orientales, Gorilla beringei graueri. Il s’étend sur 600 000 ha. On y trouve des forêts denses humides de plaine ainsi que des forêts afro-montagnardes, avec des forêts de bambous et quelques petites zones de prairies subalpines et de bruyères sur les monts Kahuzi (3 308 m) et Biega (2 790 m).

Alfredo Prince NTUMBA

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