Le secteur de l’environnement, spécifiquement celui des forêts de la République démocratique du Congo reste l’un de plus mal gérés que connait le pays, depuis plusieurs années. Avec sa contribution presque nulle au budget de l’Etat, le secteur des forêts a été caractérisé par de multiples violations du moratoire instauré sur les forêts depuis 2002. Mais surtout par une vaste campagne des pots de vin, des détournement de deniers publics, bref, le Ministère de l’environnement a été une vache à lait pour plusieurs de ses locataires.
A l’heure de la refondation de la RDC, et au regard des engagements pris du haut de la tribune de l’ONU, par le chef de l’Etat, Félix Tshsekedi, nous avons voulu retracer la gestion de quelques personnes ayant géré ce ministre. Notre réflexion va se focaliser sur la gestion de trois anciens ministres les plus controversés qui ont marqué leur passage à la tête de ce Ministère.
Amy Ambatobe (2016-2019)
Arrivé à la tête du ministère de l’Environnement et développement durable en novembre 2016, Amy Ambatobe Nyongolo reste l’un de plus controversés des locataires de ce ministère. Son passage à la tête de cette institution a laissé de marques indélébiles d’une gestion calamiteuse d’un secteur aussi stratégique que les forêts de la RDC.
Pour amadouer la société civile environnementale qui suit de prêt la gestion des forêts de la RDC, le ministre Ambatobe a procédé d’abord par annuler les arrêtés pris par son prédécesseur. Une manière de mieux calmer les ardeurs et étudier le terrain.
Comme ses prédécesseurs, il a d’abord commencé par mieux se mettre en bain, en interdisant à l’administration, toute signature devant engager le ministère aux tierces. Une façon de s’octroyer carte blanche, afin de commettre ses forfaits en toute tranquillité.
A son actif, l’on peut enregistrer l’attribution illégale de 650.000 ha de concessions forestières annulées en août 2016 par Bopolo Bongeza, ancien ministre du gouvernement Matata. Ces concessions sont attribuées illégalement à des entreprises non autrement identifiées, bien que connues.
A en croire la société civile environnementale de la RDC, « les deux entreprises au cœur du scandale seraient les mêmes qui ont été citées dans le rapport de Greenpeace en 2016 ».
Sachant qu’il devrait partir de ce ministère après les élections de 2018, Amy Ambatobe s’est organisé pour dilapider les ressources forestières de la RDC laissant derrière lui un véritable déluge. Plusieurs hectares des forêts ont été octroyés à la société Wang Peng International opérant sous le label de Maniema Union 2.
Selon les analystes, ceci a été le meilleur deal qui a permis à l’actuel député national, de financer sa campagne électorale. « L’acte posé par Ambatobe présume une corruption dans la mesure où les concessions ont été attribuées à des fins pécuniaires à hauteur de 500.000 à 800.000 USD. Il est plausible de conclure que toutes les concessions forestières retirées avant cette date ont été illégalement reprises sans aucun soubassement juridique légal, si on doit respecter la signature du Ministre qui a seul signé cet arrêté », avait décrié l’ONG Forêt en danger. Parmi les concessions retirées illégalement et attribuées à Maniema Union 2, il y’a lieu de relever celles de la société SEFOCO Sprl.
Sa gestion reste tout de même marquée par les multiples tentatives de modification du Code forestier dans le seul but de faire sauter les verrous quant au moratoire instauré sur les forêts de la RDC. Malgré les échecs, Amy Ambatobe et ses services avaient trouvé des moyens de contourner cette difficulté en se servant comme bouclier, quelques cadres de l’Administration de son ministère.
Quelques dossiers sales sur l’exportation du bois rouge dans le Katanga, et la gestion de redevances minières n’ont pas échappé à son actif.
Robert Bopolo Bongeza (2015-1016)
Après avoir décrié et condamné les malversations orchestrées par son prédécesseur Bienvenu Liyota, Robert Bopolo Bongeza a attribué à son tour deux titres forestiers en violation flagrante du moratoire de 2002.
L’ancien ministre de l’Environnement avait attribué en septembre 2016, près de 400 mille hectares des forêts dans les provinces de la Tshopo et de la Mongala. Ces concessions ont été attribuées irrégulièrement à Faustin Lokinda, Président du Conseil d’administration du groupe Les Bâtisseurs du Congo (GBC) en même temps, Conseiller du Chef de l’Etat chargé de l’Agriculture et du Développement rural, et Jacques Mokako Nzek, Député national.
Une situation décriée par l’ONG internationale Greenpeace Afrique. « Cet acte met en évidence l’incohérence du gouvernement congolais qui veut d’une part l’appui financier de CAFI tout en négligeant complètement son propre moratoire institué en 2002 », avait commenté Irène Wabiwa Betoko, Chargée des campagnes forêts à Greenpeace.
Bienvenu Liyota Ndjoli ( 2014-2015)
Mi-août 2015, trois concessions forestières sont attribuées à deux sociétés chinoises par Bienvenu Liyota, alors Ministre de l’Environnement. Il s’agit de la société Forestièrepour le Développement du Congo(SOMIFOR) et de la Millénaire Forestière(FODECO), deux entreprises chinoises reconnues légalement par l’Etat congolais. Ces entreprises assujetties au régime fiscal congolais, n’ont cependant pas de siège social en RDC.
Quelques jours après son arrivée à la tête du Ministère, Robert Bopolo Bongeza, n’avait trouver mieux que d’annuler ces contrats signés par son prédécesseur. Qualifiant ainsi l’acte posé par Bienvenu Liyota de « malversation ». Par arrêté, Bopolo Bongeza avait annulé ces contrats signés par son prédécesseur.
« Par précaution, nous allons annuler ces trois contrats illégaux qui sont nuls et de nul effet », avait-il déclaré. « Dans les archives du ministère de l’Environnement, il n’y a aucune trace des contrats attribuant trois concessions forestières à deux sociétés à capitaux chinois. Le Trésor public n’a rien encaissé dans cette transaction illégale».
Et d’ajouter qu’il avait décidé de les annuler afin d’éviter que les détenteurs s’en prévalent ultérieurement. Cette affirmation avait suscité beaucoup d’émoi et de consternation sur la traçabilité des actes posés par les autorité politiques à la tête de ce ministère. Une situation qui, en son temps, avait été à la base des injures sur la place publique entre le ministre entrant et sortant au ministère de l’Environnement.
Peau de banane sous les pieds
Victime d’une mauvaise gestion chronique, le ministère de l’Environnement et développement durable a fini par attirer l’attention des activistes de l’Environnement, notamment la société civile environnementale qui désormais scrute tout fait et geste que posent les locataires de ce ministère.
Il en va de soi, que la gestion de Claude Nyamugabo soit passée au peigne fin. Ainsi, tout acte allant dans le sens de la mauvaise gestion, pourrait avoir des conséquences désastreuses. Comme qui dirait, un homme averti en vau deux.
Nous y reviendrons avec plus de détails dans nos prochains numéros.
Alfred NTUMBA