Une enquête menée par EIA (Environmental Investigation Agency) pendant quatre ans établit que des tonnes de placages en bois de source illégale en provenance du Gabon et de la République du Congo ont régulièrement été importées aux États-Unis et que, depuis plus de dix ans, ces produits se sont frayés un chemin jusqu’à des milliers de consommateurs étatsuniens. Les conclusions d’EIA révèlent que le « Groupe Dejia », l’un des groupes chinois de sociétés forestières les plus influents d’Afrique, a bâti son empire sur la corruption, l’évasion fiscale et de multiples infractions forestières.
Dans ces malversations sont impliqués des personnalités influentes dans les deux pays concernés. Pour la République du Congo, il s’agit de Henri Djombo, l’un des plus anciens ministres en Afrique (dont 19 ans passés au poste de ministre de l’Économie forestière de la République du Congo). « L’un des principaux responsables du Groupe Dejia en République du Congo a déclaré aux enquêteurs d’EIA qu’une mallette pleine d’argent liquide était fréquemment remise au ministre en échange de ses services », précise ce rapport.
La capacité à obtenir un soutien solide des décideurs s’est avérée essentielle. Le réseau des parrains du Groupe Dejia comprend notamment l’un des diplomates les plus influents d’Afrique, M. Jean Ping, ancien président de la commission de l’Union africaine et ancien président de l’Assemblée générale des Nations unies. En échange de son soutien politique et de ses nombreuses relations en Chine et en Afrique, M. Xu, qui n’est autre que le neveu de M. Ping, aurait été le principal financeur de la campagne présidentielle de M. Ping en 2016 au Gabon, comme Le cerveau du Groupe Dejia.
«En échange du soutien politique et des nombreuses relations partagées par M. Jean Ping tant en Chine qu’en Afrique, M. Xu aurait été le principal financeur de la campagne présidentielle de M. Ping au Gabon en 2016 », indique ce rapport.
Selon des estimations cohérentes et prudentes, entre 20 et 50% de tout le bois commercialisé à l’échelle internationale a été exploité ou commercialisé de façon illégale ou à partir de sources à haut risque. Les groupes criminels organisés sont de plus en plus impliqués dans ce secteur et sont désormais responsables de 50 à 90% de l’exploitation forestière illégale et du commerce connexe dans le monde. L’exploitation forestière illégale prospère et alimente un vide en matière de gouvernance dans les pays où elle se produit.
« Les preuves rassemblées par EIA révèlent que le Groupe Dejia n’est, en aucune façon, un cas isolé. Les délits forestiers couverts par la corruption apparaissent systémiques et étroitement liés au fonctionnement de l’exploitation forestière industrielle au Gabon et en République du Congo. Ces deux pays représentent plus de la moitié de la superficie allouée à l’exploitation forestière dans le bassin du Congo. Une filiale du groupe Dejia a surexploité à elle seule plus de 15 000 arbres appartenant à 46 espèces différentes entre 2013 et 2016 », peut-on lire dans ce rapport.
EIA recommande aux pays concernés de Suspendre immédiatement les activités des filiales du Groupe Dejia et mener une enquête approfondie sur leurs pratiques en matière d’exploitation forestière, de commercialisation, de transformation et d’exportation; Lancer une opération de répression de la corruption et de l’évasion fiscale dans le secteur forestier; Renforcer les cadres réglementaires avec des mesures dissuasives contre l’exploitation forestière illégale et les délits financiers connexes.
Télécharger le résumé du rapport ici Commerce_Toxique_Principaux_Resultats-web
Alfred NTUMBA