La République Démocratique du Congo dispose d’un plus grand patrimoine forestier d’Afrique. Elle possède le deuxième massif des forêts tropical du monde, après le Brésil. Le cadre légal de la RDC prévoit de dispositions qui fixent les modalités d’attribution des concessions forestières aux communautés locales. Ces forêts dites communautaires appartiennent à la catégorie des forêts protégées. Pour se rendre compte de la manière dont ces forêts communautaires ont été créées et gérées en République Démocratique du Congo, nous avions accompagné MBOU MON TOUR une ONG locale, qui œuvre pour la mise en place de la forêt communautaire de la rivière MBALI dans le territoire de BOLOBO, à environ 300km au nord de Kinshasa.
C’était notre première fois de faire un si beau voyage sur le majestueux fleuve Congo. Nous avions été épris par des spectacles inouïs des vagues et des embarcations de fortune. A ce spectacle s’invitait également des paysages splendides et un coucher de soleil aux couleurs irisées.
L’ONG MBOU MON TOUR a été créée en 1997 par des cadres universitaires et des villageois suite au constant malheureux fait par ses membres fondateurs d’une raréfaction soudaine et rapide de la faune locale.
Cette dernière était jusqu’ici riche et variée, et constituait la principale source d’approvisionnement en gibier et poissons pour les populations. Les deux objectifs majeurs de cette ONG sont donc la protection de l’environnement et la lutte contre la pauvreté par l’amélioration des conditions de vie des populations villageoises.
Elle mène cette lutte par l’encadrement qu’elle offre aux petits éleveurs par ses activités de métayages et de vulgarisation de l’usage des produits vétérinaires. Le village de NSUMBIRI à quelque encablure du fleuve, était le point de départ de notre exploration.
Il existe au total huit villages et terroirs coutumier qui ont adhéré à la campagne de protection de la biodiversité menée depuis 2001 par l’ONG MBOU MON TOUR. Il s’agit notamment de villages de Mbee, Enguru, Mobeya tsalu, Makaa, Bodzuna, Nkala, Embirima et Mpelu, situés dans la chefferie de Batéké nord, territoire de bolobo, district des plateaux, province de Bandundu.
A la suite de cette sensibilisation, les autorités coutumières locales en accord avec la population ont accepté de consacrer une partie de leurs forêts à la protection de l’environnement, plus particulièrement aux conservations communautaires des bonobos et de petits singes.
Notons que ces espaces sont toujours accessible aux humains mais les activités y sont réduites (pas de chasse, pas de champs…) Ainsi, nous avons décidé donc de parcourir tous ces villages concernés, afin de mieux comprendre la motivation.
Il existe réellement une cohabitation entre les bonobos et les tekes
La protection des bonobos chez les TEKE ne relève pas du hasard. Depuis la nuit de temps ce peuple observe un interdit alimentaire sur cette espèce. En effet, les bonobos sont considérés par cette ethnie comme un humain qui s’est refugié dans la forêt pour n’avoir pas honoré sa dette, échappant ainsi à une ancienne loi coutumière qui faisait d’un débiteur insolvable l’esclave de son créancier. Apres quelque dizaine de kilomètre, c’était le village d’EMBIRIMA. D’un regard évasif, nous avons remarqué la présence des chercheurs et des étudiants de nombreux pays qui mènent des enquêtes dans ce site.
Apres le village d’EMBIRIMA c’était le tour du village NKALA, une collectivité des BATEKE nord, territoire de BOLOBO district des plateaux, province de Bandundu. C’est dans ce village que l’idée de créer l’organisation non gouvernementale (ONG) Mbou Mon Tour est née. Au lendemain de notre périple, les représentants de six villages concernés par le projet de la forêt communautaire de la rivière MBALI ont signé en présence des autorités administratives, le plan de gestion de ladite forêt.
Après cette étape, l’ONG MMT poursuivra la procédure pour l’obtention de l’arrêté du ministère de tutelle. Loin de tout vacarme de la ville, nous avions emprunté la piste défoncée de la forêt de MANZANO. Ces écosystèmes exceptionnels, nous ont projetés dans un univers calme où vivent les bonobos de BOLOBO.
C’est dans cet habitat naturel que nous y avons découvert Pan Paniscus en totale liberté. Nous sommes parfois partis à 4heures du matin de la ferme pour marcher 2heures dans la forêt et les trouver dans leurs nids en haut des arbres, encore endormis. Leur tranquillité naturelle associée au travail de repérage des pisteurs, permettent de les découvrir très fréquemment, à l’état sauvage et aucun risque.
Dans cette forêt, les bonobos se nourrissent des plantes mais aussi de fruits. Le cadre est inhérent à la recherche.
De la protection de la biodiversité au développement durable
Pour compenser les efforts des populations qui ont donné leur forêt à la conservation, l’ONG MMT investit dans le développement durable. Au total, 4 ponts ont été jetés sur cette rivière pour permettre la circulation des biens et des personnes. Outre les infrastructures, MMT avec l’aide de partenaire développe des activités alternatives, notamment l’agroforesterie, et l’élevage durable. Ce projet vise à ravitailler les villageois en semences amélioré, afin de lutter efficacement contre la malnutrition. Dans le souci de désenclaver le territoire, l’ONG a doté tous les villages concernés par le projet de kit de matériels de réception satellitaire.
Apres 14 jours de tournage, nous avons finalement décidé de quitter la chefferie de BATEKE nord. Notre séjour a été marqué par l’hospitalité d’un peuple qui ne cesse d’espérer en un avenir meilleur grâce à la conservation. L’expédition à BOLOBO nous a permis de mieux cerner la procédure de la création d’une forêt communautaire en RDC. En attendant l’arrêté ministériel, nous espérons y retourner un jour.
Laura NDJABARINGA